La fin des niveaux de jeux « faits main » ?

screen568x568Avec l'intelligence artificielle, les textures procédurales, permettant de générer de façon aléatoire, des bâtiments ou des villes entières, constituent un autre domaine de prospective pour le jeu vidéo. Depuis Diablo, les joueurs connaissent déjà les bienfaits de la génération aléatoire de nouveaux niveaux ; mais désormais ces technologies se démocratisent, des blockbusters aux productions indépendantes.

Il y a quelques années, seules les productions les plus coûteuses, dites triple A, pouvaient accéder à ce type de technologies. Mais avec les évolutions des pratiques de jeux, l'essor des tablettes tactiles et des smartphones, d'autres acteurs font désormais appel à ces technologies. "Si l'on se rappelle de la situation il y a quelques années, le marché est plus dur au niveau des triple A, mais plus ouvert avec les studios indépendants", commente Lionel Barret de Nazaris, consultant spécialisé dans le jeu vidéo.

Pour le concepteur, la génération procédurale permet de créer de la nouveauté à moindre frais ; pour le joueur, c'est aussi la promesse de cartes ou de mondes à visiter, sans cesse renouvelés.

Le secteur des grosses productions ludiques demeure friand de ce type d'outils. Un gros studio se posera en effet des problèmes d'ordre hollywoodiens. Quand un budget atteint plusieurs dizaines de millions de dollars, se posera la question de savoir s'il n'est pas pertinent de dépenser quelques millions supplémentaires, pour disposer d'une technologie maison", note M. Barret de Nazaris.

Croisement avec le big data

D'autres acteurs, toutefois, essaient d'utiliser le potentiel de ces technologies. C'est le cas des productions sur les terminaux mobiles, mais également de certains jeux indépendants. Le jeu cartoonesque Tiny Wings, est l'un des exemples de cette utilisation des technologies procédurales : les collines, qui constituent les principaux obstacles du volatiles, sont générées aléatoirement.

Le jeu de plateformes Spelunky génère aussi des niveaux de façon aléatoire. "Il est assez facile de faire de créer des choses parfaites, mais les choses humaines sont plus difficiles, exemple de la maison en 3D", prévient toutefois M. Barret de Nazaris. Sur le site spécialisé Indiestatik, le journaliste Chris Priestman, qui met en garde contre un recours systématique à ce type de technologies.

La génération procédurale de contenus est également appelée à évoluer. Certains développeurs expérimentent le croisement entre le "big data", et les techniques procédurales. C'est le cas par exemple, du jeu Steambirds : survival, qui revendique la fin des niveaux de  jeux "faits main".  "Nous sommes plus proches de mathématiciens, explorant une nouvelle classed d'équations, que des auteurs essayant de créer la nouvelle variation du périple d'un héros", expliquent les créateurs du jeu.

Laurent Checola

Crédits : Andreas Illiger.

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Nouvelles Consoles : l’émergence d’une génération d’intelligence artificielle ?

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Les parties de Forza Motorsport 5, sorti fin novembre sur Xbox One, se suivent, mais ne se ressemblent pas. Quand le joueur arpente un nouveau circuit, il affronte des adversaires à la conduite spécifique, tantôt agressive, tantôt plus subtile. Cette production de Turn 10 entend sortir des sentiers battus de la simulation automobile, qui pêche souvent par des intelligences artificielles stéréotypées, qui semblent suivre des rails.

Forza Motorsport est la vitrine technologique de la nouvelle machine de Microsoft, mais c'est aussi une manière de promouvoir le système Drivatar, censé accroître le réalisme des conducteurs. Le drivatar est le clone virtuel de joueurs bien réels.

Au fil des parties l'identité numérique des joueurs s'affine et est utilisée dans les parties. "L'idée de Drivatar est née sur la première Xbox, il y a près de 10 ans. Mais pour cette technologie, en avance sur son temps, nous nous avions besoin d'un saut significatif en terme de capacité des machines. C'est ce que permet d'avoir le système d'informatique dématérialisée (cloud) de Microsoft. Les adversaires dans Forza 5 ont des forces et des faiblesses, ils font des erreurs", souligne Dan Greenawalt, directeur créatif de Turn 10 Studios. Comme des milliers de joueurs mettent à jour chaque jour leurs profils dans le nuage, la masse de donnée qui alimente les attitudes des joueurs virtuels grandit et les attitudes sont de plus en plus complexes et nuancées", poursuit-il.

Les nouvelles consoles, Playstation 4 et Xbox One, verront-elles éclore de nouvelles générations d'intelligences artificielles, au delà des seuls jeux de simulation automobile ? "Je peux assez facilement imaginer ce genre de fonctionnalités sur d'autres types de jeux, comme les jeux de tir en vue subjective, les jeux de stratégie, etc", estime M. Greenawalt.

Pourtant, nombreux sont les acteurs à estimer que ce secteur, pourtant prometteur, demeurera encore peu exploité avec cette génération de consoles. D'abord, parce qu'il pèse peu à l'échelle globale du marché du jeu, estimé à un peu plus de 50 milliards d'euros. Pour Laurent Michaud responsable de l'Idate, le marché mondial de l’intelligence artificielle avoisine 200 millions d’euros au niveau mondial.

Tourner en boucle ?

Avec les nouvelles consoles, on a tendance à sous-estimer la couche logicielle. Ce n'est pas parce que l'on a une machine puissante, que le software va nécessairement suivre", souligne Jérôme Hoibian, fondateur de l'entreprise Spirops, spécialisée dans l'intelligence artificielle. Dans un jeu vidéo, l'intelligence artificielle se fonde sur trois principes : la perception, la réflexion, et l'action proprement dite de l'avatar.

L'histoire des intelligences artificielles risque donc de tourner en boucle et de continuer sur le même modèle. Dans les jeux de tir, l'ennemi dispose d'un cône de vision. Même si le joueur se place à quelques centimètres du champ, l'adversaire demeure impassible, c'est seulement où il passe cette ligne imaginaire que l'ennemi tire toutes ses cartouches. Nous sommes loin de l'avènement de personnages virtuels dotés de réelles émotion, de comportements ou de motivations subtils et complexes. L'exemple de Grand Theft Auto V laisse toutefois entrevoir une psychologie des foules vraisemblable.

Lire : "GTA V", un bad boy chez les blockbusters

L'implémentation d'intelligences artificielles est à la frontière de la conception des niveaux d'un jeu, et peut donc se heurter aux contraintes de production. C'est en général en bout de chaîne que se pose la question de l'intelligence artificielle. "Même si les jeux sont interactifs, les game designers ont tendance à concevoir les jeux comme un film", note M. Hoibian. "Nous sommes loin de L'arche du Captain Blood, où le concepteur lui même ne savait sans doute pas si son jeu pouvait être fini", ironise-t-il. Et de conclure : "Il faut que les créatifs s'approprient l'IA, c'est dans la création indépendante que l'on trouvera l'équivalent d'un Minecraft, pour l'intelligence artificielle", martèle-t-il.

Les outils permettant l'émergence de ce type de créations sont d'ailleurs accessibles dans depuis des moteurs comme Unity, très utilisé par les développeurs indépendants.

Laurent Checola

Crédits : Turn 10.

A lire aussi : La fin des niveaux de jeux « faits main » ?

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Jeux vidéo et droits d’auteur : YouTube change les règles

Youtube

Les protestations de youtubers mécontents s'accumulent sur les réseaux sociaux : les contestations pour atteinte à la propriété intellectuelle se multiplient à l'encontre de ceux qui utilisent des images de jeux vidéo pour réaliser des chroniques ou des tests. Selon la presse spécialisée, plusieurs milliers de ces messages ont été envoyés.

Comme l'explique l'un d'entre eux – dont les demandes de régularisation ont doublé en quelques jours –, lorsqu'une vidéo est signalée comme portant atteinte au droit d'auteur, la conséquence immédiate est que les recettes publicitaires ne sont plus partagées sur le contenu incriminé. Les youtubers constatent aussi la rapidité d'exécution entre le signalement et la « coupure » de la publicité, même s'il est possible de contester la décision.

Sur le site spécialisé Kotaku, un responsable de YouTube, propriété de Google, livre son explication, mercredi 11 décembre.

Pour déterminer les contenus portant atteinte au droit d'auteur, la plateforme de vidéos utilise un système d'identification de contenu (Content ID) qui, à partir d'une base de données fournies par les ayants droit de la musique, du cinéma ou du jeu vidéo, établit des correspondances avec les vidéos mises en ligne. Cité par Kotaku, un porte-parole de YouTube explique que le système de Content ID a été étendu aux Multi-Channel Networks partenaires de la plateforme de vidéos, et notamment aux chaînes de jeux comme Machinima.

Prise de distance des éditeurs

De nombreux éditeurs de jeux ont rapidement cherché à prendre leurs distances avec ces mesures de restriction. C'est le cas du japonais Capcom, du français Ubisoft ou de Blizzard. Deep Silver a pour sa part publié une longue réponse, sans ambiguïté. « Deep Silver n'a pas l'intention d'interdire aux joueurs de créer des contenus sur YouTube », explique l'éditeur de jeux, dont Saints Row ou Metro 2033.

Ce n'est pas la première fois que la question des revues en vidéo des jeux fait débat. Cet été, Nintendo a affiché son intention de contrôler les revenus générés par la publicité quand les images sont tirées des licences de la firme japonaise.

Ce nouvel épisode est le signe que la vidéo en ligne est devenue un enjeu majeur pour l'industrie du jeu. Selon une étude réalisée par… YouTube sur les jeux et les consoles les plus populaires de l'année 2012, les contenus produits par les développeurs ou les éditeurs constituent le gros des visionnages avant le lancement d'un jeu, quand les contenus produits par les utilisateurs sont plébiscités après la sortie.

Au-delà des plateformes traditionnelles de vidéos en ligne, comme Youtube et Dailymotion, d'autres acteurs essaient de capter ce nouveau public. C'est le cas, notamment, de la jeune pousse Twitch.

Laurent Checola

Lire : La vidéo, nouvel enjeu du jeu

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Mojo, la dernière née des consoles Android

Madcatz

Si deux des principaux consoliers, Microsoft et Sony, viennent de lancer leur console de salon, d'autres acteurs tentent d'investir des niches de joueurs. C'est le cas du spécialiste des équipements pour joueurs Mad Catz, qui a lancé, mardi 10 décembre, une console hybride, baptisée M.O.J.O.

Mad Catz, qui entend trouver avec sa machine un nouveau relais de croissance, n'est pas le premier à vouloir conquérir le marché des microconsoles, fonctionnant essentiellement avec le système d'exploitation Android. Pour ce faire, l'équipementier envisage sa machine comme un appareil multimédia, permettant de dresser un pont entre les terminaux mobiles et le grand écran du salon.

Dotée d'un processeur puissant - Tegra 4, d'Nvidia - elle est censé offrir une expérience sur grand écran pour des titres initialement destinés à la plateforme mobile Android. Au-delà des jeux, la MOJO se veut compatible avec d'autres applications, telle que la lecture de fichiers vidéo ou musicaux. Après une prochaine mise à jour, la machine devrait également permettre de streamer les jeux disponibles sur un PC.

La manette de la MOJO a aussi sa particularité. Elle permet, grâce à son socle, de fixer un smartphone et donc d'ajouter au jeu mobile une expérience plus proche du jeu console. Il sera toutefois difficile pour Mad Catz de s'imposer, même s'il dispose de bons relais de distribution. Les premières critiques sont d'ailleurs mitigées notamment à cause du rapport qualité-prix. Si la machine est présentée comme une microconsole, ce n'est pas, avec son prix de 250 dollars, une console low cost…

De nombreux prétendants

Le segment des machines Android dédiées au jeu est également très concurrentiel. La Ouya, soutenue par les contributions du site de financement participatif Kickstarter, demeure la machine la plus représentative de cette tendance. Sur Kickstarter, les promoteurs de la Ouya ont levé plus de 8,5 millions de dollars, auprès de 63 500 soutiens.

Mais au final, la Ouya peine à proposer un catalogue exclusif de jeux indépendants, ce qui était la promesse de cette machine. Il est d'autant plus difficile de se distinguer des machines "grand public", que Sony et Microsoft ont affiché un soutien aux productions indépendantes. Ouya propose certes une machine bien moins chère, mais avec des capacités plus réduites par rapport à une PS3 ou une Xbox 360.

Le Gamestick prend un parti pris différent. Avec son design minimaliste, il entend  tirer le meilleur du jeu Android, tout en garantissant, avec sa manette, une expérience de jeu en salon.

 A l'image de Mad Catz, le segment des consoles Android attire aussi des acteurs déjà impliqués dans l'univers du jeu vidéo. C'est le cas de la Shield, conçue par le groupe spécialisé dans les cartes graphiques Nvidia. La machine, hybride, permet d'accéder aux jeux Android, mais également de streamer les jeux PC. C'est donc aussi un démonstrateur technique pour Nvidia, notamment en terme de hardware, mais aussi pour sa technologie de serveurs, Grid.


Avec son prix de 250 dollars, la MOJO de Mad Catz est donc en concurrence directe avec la machine d'Nvidia.

Laurent Checola

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Crédits : Mad Catz.

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